REGARDS D’ARTISTES

  • La banlieue de Paris : Un témoignage et une immersion dans la banlieue de l’époque de Blaise Cendrars, accompagné de photographies de Robert Doisneau. 
  • Les passagers du Roissy-Express En 1990, François Maspero effectue, accompagné d’une photographe, un voyage entre les terminus de la ligne B du RER. Dans son livre, il décrit les paysages traversés, notamment en banlieue sud. 
  •  Les jeunes de banlieue mangent-ils des enfants ? Avec cet essai, Thomas Guénolé tord le cou aux idées reçues à propos des banlieues et dresse le portrait, beaucoup moins spectaculaire, de la réalité des « vrais » jeunes y vivant.
  •  Banlieue, banlieue, banlieue Ce livre d’Alain Berth questionne le discours adossé aux banlieues, qui constitue souvent un mode de catégorisation du social. Usant d’outils historiques et critiques, c’est autour de cet enjeu de territorialisation du social que l’auteur développe sa pensée et propose une autre vision de la banlieue.
  •  Voyage de classes Une étude sociologique portée par Nicolas Jounin et menée par des étudiants de Seine-Saint-Denis, qui se rendent dans les beaux quartiers de Paris pour se familiariser avec des coutumes qui leur sont étrangères. En 2016, l’ouvrage reçoit le prix lycéen du livre d’économie et de sciences sociales.

Pour dépasser les stéréotypes D’autres ouvrages tels que Les Gars de Villiers (Pascal Egré) ou encore Paroles de banlieue (Jean-Michel Décugis et Aziz Zemouri), donnent la parole aux habitants des quartiers. On y retrouve des jeunes ordinaires, animés par l’envie de réussir. Deux piliers se distinguent : le foot et la religion – les “deux ailes” d’un oiseau qui échappe à un quotidien précaire.

  • La banlieue “pittoresque”

En 1931, l’Église catholique réalise un documentaire dénonçant l’absence de lieux de culte adaptés dans la banlieue parisienne. La banlieue rouge devient terre de mission pour l’Église. La même année, un second court-métrage sera réalisé. Il expose la construction d’églises et de locaux paroissiaux par des chômeurs bénévoles dans la proche banlieue, sous l’égide du cardinal Verdier. Les images des chantiers, des inaugurations et des enfants accueillis témoignent du caractère militant d’un tel projet.

Dans ces années-là, la banlieue au cinéma n’existe que par sa ressemblance à la campagne. Elle représente un espace pittoresque, un lieu de petits récits proches de ceux décrits par les impressionnistes. Ainsi, dans Partie de campagne, Jean Renoir reprend les motifs des peintures de Manet et met en scène un drame romantique et social. La banlieue est alors ramenée à son rôle de lieu de villégiature, un “sous-Paris” dédié aux besoins du centre. C’est plus tard que le cinéma s’est saisi des spécificités et des récits propres à la banlieue.

En 1945 paraît En attendant la ville de demain, une réalisation anonyme qui expose les baraquements provisoires où vivent encore de nombreuses familles, un an après la fin de la guerre. Dans le même temps, les chantiers de construction édifient les villes de demain.

  • Un regard dur et tendre sur la banlieue

Entre 1950 et 1960, le cinéma change de regard sur les banlieues. À une vision insouciante et romantique, les représentants de la Nouvelle Vague (François Truffaut, Agnès Varda, Alain Resnais…) préféreront une approche plus contrastée des villes nouvelles, de leur expansion, des lotissements pavillonnaires et des grands ensembles.

Avec L’amour existe, Maurice Pialat propose une œuvre aux frontières du poème et du documentaire, décrivant une réalité de la vie banlieusarde, éloignée des centres-villes bourgeois.

Dans Deux ou trois choses que je sais d’elle, Jean-Luc Godard dresse le portrait d’une crise familiale au sein d’un HLM et, à travers elle, celui d’une société qui reconfigure les rapports humains et les modes de consommation.

C’est en 1957 qu’est réalisé le film Paris et le désert français. Roger Leenhardt et Sydney Jezequel y évoquent les conséquences économiques de la centralisation parisienne et de l’activité industrielle française. Le film s’attarde sur deux villes : Gourdon, dans le Quercy, où le départ de la population défait le tissu social ; et Goussainville, cité dortoir du Val-d’Oise (95), qui ne dispose pas d’équipements appropriés pour faire face à l’afflux de travailleurs parisiens.

En 1959, le court-métrage Ma belle banlieue d’Andrée Sallé propose un portrait fantaisiste et décalé de la banlieue et de ses habitants : la zone, les habitations de fortune, les bords de Seine, les loisirs, les bistrots. On y vit, on y grandit, on s’y détend, en s’accommodant de peu.

  • Entre comédie du quotidien et série noire

En 1970, Un malien d’Ivry, documentaire de Jean Mailland, dénonce les conditions de vie des immigrés africains dans les foyers vétustes de la vie d’Ivry-sur-Seine.

Trois ans plus tard, Elle court, elle court la banlieue présente de façon humoristique la vie effrénée des banlieusards dans la jungle des transports.

Dans le même temps, des films tels que Série Noire ou Le Thé au harem d’Archimède proposent des intrigues policiers qui anticipent l’arrivée d’un cinéma plus social.

  • Révolte masculine dans les cités

La dégradation rapide des grands ensembles, l’insalubrité et la fuite des classes moyennes hors des cités révèlent certains problèmes dans les banlieues. Le cinéma accompagne le dépassement de la vision de la banlieue comme simple cadre de vie mais comme un véritable enjeu social. La Haine de Mathieu Kassovitz, réalisé en 1995, est l’un des premiers films à mettre en scène la colère des jeunes de banlieue. Exposant la violence du quotidien dans les grands ensembles, le film montre aussi la séparation entre la banlieue et la capitale, totalement étrangère aux protagonistes.

Dans De l’autre côté du périph’, Bertrand Tavernier filme durant 3 mois la vie des habitants de la cité des Grands Pêchers à Montreuil. Leurs témoignages permettent au réalisateur de mettre en lumière les questions de racisme, d’intégration et de délinquance.

  • Des filles, des enfants, des lascars…

Le nouveau millénaire marque un changement dans la représentation des banlieues au cinéma. Les cinéastes s’intéressent plus aux différents habitants, le cadre se resserre sur la diversité des populations, on étudie leurs progressions, leurs accomplissements mais aussi ce à quoi ils se cognent. Dans L’esquive, l’accent est mis sur le quotidien des adolescents dans leur environnement scolaire tandis que Tout ce qui brille raconte la vie de jeunes femmes en quête d’une nouvelle vie à Paris.

La figure du lascar va, dans le film d’animation homonyme, donner à voir ces jeunes vivant comme un poisson dans l’eau au sein de leurs cités, mais qui peine à évoluer hors de son milieu.

Enfin, le long métrage Entre les murs s’empare de la ségrégation des jeunes issus des populations immigrés au sein d’une école du 20e arrondissement.

  • Des banlieusards

Dans les années 2010, le cinéma s’intéresse davantage aux profils singuliers que l’on retrouve en banlieue : les jeunes en perte de repères dans La Désintégration et Bande de filles, une vieille dame vendeuse de cannabis dans Paulette, des élèves délaissés qui ne demandent finalement qu’à apprendre dans Les Grands Esprits, etc. Le cinéma se plaît aussi à raconter des parcours de réussite et d’ascension sociale, comme dans Le Brio ou Intouchables.

La banlieue fait également son apparition sur les plateformes de streaming tel que Netflix avec une réalisation du rappeur Kery James Les Banlieusards. Le film parle de trois frères issus de la banlieue parisienne empruntant des chemins de vie différents. 

En 2019, Les Misérables raconte la relation entre banlieusards et policiers de la BAC. Ce film remporte 4 Césars ainsi qu’une nomination à l’Oscar du meilleur film international.

RESSOURCES



La grande pitié de la banlieue
Réalisation : Anonyme
Documentaire, 1931, NB, court métrage

Documentaire réalisé par l’Eglise catholique et dénonçant l’absence de lieux de culte adaptés à l’urbanisation récente de la banlieue parisienne à Asnières, Cachan, Choisy-le-Roi et Champigny… Dans les années 1920-30, la banlieue, et en particulier la banlieue rouge, devient terre de mission pour l’église.

Consultable dans la salle des collections du Forum des images


Les chantiers du cardinal
Réalisation Anonyme
Documentaire, 1931, NB 14min
Société de production : Anonyme

Reportage réalisé par l’Eglise catholique sur la construction d’églises et de locaux paroissiaux par des chômeurs bénévoles dans la proche banlieue sous l’égide du cardinal Verdier.
Des images des chantiers et des inaugurations des bâtiments alternent avec des vues des enfants qui y sont accueillis, soulignant ainsi la misère spirituelle d’une population totalement démunie. Des cartons au ton virulent soulignent le caractère militant de ce document.

Consultable dans la salle des collections du Forum des images


Les castors de la Haute-Bornes
Ils ont filmé l’Essonne 
Documentaire/ image d’archive 1954, NB, 8 minutes

1954, il est très difficile de se loger. A Viry-Châtillon, une quinzaine d’hommes reprend une idée de l’époque : créer un groupement « Castors » où les gens bâtissent leur maison eux-mêmes. Photographe à la SNCF, André Rivierre s’intéresse au cinéma amateur, profite de la démocratisation de cette pratique pour acheter une caméra et filme le chantier. Le film est un formidable document sur le mouvement d’auto-construction coopérative des Castors. Le témoignage écrit et lu par le cinéaste donne à la fois le ton et l’ampleur du chantier : tout a été fait à la main, des parpaings à la charpente…

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Paris et le désert français
Réalisation : Roger Leenhardt, Sidney Jézéquel d’après le livre de Jean-François Gravier.
Documentaire, 1956, NB, 27 min

La centralisation sur Paris de l’activité industrielle française pose de graves problèmes économiques. Pour illustrer ce propos, la caméra s’attache à décrire deux villes : Gourdon, dans le Quercy, où le départ de la population déstructure le tissu social, et Goussainville, cité dortoir du Val d’Oise (95), qui ne dispose pas d’équipements appropriés pour faire face à l’afflux d’habitants qui travaillent à Paris.

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Ma Belle Banlieue
Réalisation : André Sallée
Documentaire, 1959, NB, court-métrage
Société de production : Kerfrance productions

Après un bref historique de l’évolution de la capitale au cours des siècles, ce dessin animé expose l’accroissement anarchique de l’agglomération parisienne et les perspectives idéales du développement urbain.
Les dessins des îlots insalubres des années 1950, des banlieues pavillonnaires, des cités dortoirs, des villes nouvelles, et du projet de La Défense, accompagnés d’un commentaire en vers, illustrent ce propos de façon humoristique.

Consultable aux Archives françaises du film du CNC ou à la BNF-François Mitterrand


Demain Paris
Réalisation : Michel Boschet, André Martin
Documentaire, 1960, couleur, 15 min
Société de production : Les Films Roger Leenhardt

Après un bref historique de l’évolution de la capitale au cours des siècles, ce dessin animé expose l’accroissement anarchique de l’agglomération parisienne et les perspectives idéales du développement urbain.
Les dessins des îlots insalubres des années 1950, des banlieues pavillonnaires, des cités dortoirs, des villes nouvelles, et du projet de La Défense, accompagnés d’un commentaire en vers, illustrent ce propos de façon humoristique.

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Ils ont trouvé un appartement
Réalisation : François Gir, Henri de Turenne
Documentaire, 1965, NB, 11 min
Société de production : RTF – Série 5 Colonnes à la une

Un jeune couple, récemment relogé dans un HLM d’Orly (94), évoque les conditions de vie misérables qu’il a connues pendant sept ans dans un bidonville de Bois-Colombes (92). Ce reportage, véritable plaidoyer en faveur du logement social, est extrait de l’émission “5 Colonnes à la une”, produite par Pierre Desgraupes, Pierre Dumayet, Igor Barrère et Pierre Lazareff, qui fut entre 1959 et 1968 l’un des principaux magazines d’information de la télévision française.

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Malakoff votre ville
Film 16 mm 
Documentaire, 1970, NB, 42 min
Collection ciné-archive 

Ce film de la commune de Malakoff est réalisé à la veille des élections municipales de 1971. Organisé en trois parties, il expose les réalisations de la ville mais donne également à entendre la parole d’habitants, de responsables associatifs ou techniques et d’élus, à commencer par le maire élu à la suite du décès du communiste Léon Salagnac, le membre du Comité central du PCF et directeur des Cahiers du communisme, Léo Figuères (1918-2011).

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Un Malien d’Ivry
De Jean Mailland
Documentaire, 1970, NB, 11min
Société de production : ORTF – Série Panorama

Suite à la mort d’immigrés maliens dans l’incendie d’un foyer à Ivry (94), ce reportage, à travers des images de manifestations et des interviews de travailleurs maliens et d’officiels français, dénonce les conditions de vie déplorables des immigrés africains dans ces foyers vétustes. Ce reportage est extrait du magazine télévisé “Panorama”, qui analyse les grands événements de l’actualité française sous forme d’interviews et de reportages.

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Vivre à Ivry
Film 16mm 
Durée 18 min
Documentaire, 1975, NB, 18 min
Collection ciné-archives

Réalisé par le Service municipal d’information de la municipalité communiste d’Ivry-sur-Seine, ce reportage s’appuie sur des entretiens, sous forme de micro-trottoir, avec la population de la ville. Plusieurs thèmes sont successivement évoqués dans le documentaire : en premier lieu les enjeux de logement, mais aussi la place des équipements sociaux et culturels, la rénovation urbaine, la question de l’emploi et de l’industrie. Les réactions des habitants varient selon les sujets abordés : souvent élogieux, ils soulèvent aussi les difficultés, les incertitudes et les limites de l’action municipale et de l’évolution de leurs quartiers.

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Nous 
Documentaire 1h57
2020 (France)
Réalisation Alice Diop

Un voyage à travers la banlieue parisienne le long de la ligne B du RER, pour un portrait en mosaïque de ceux qui l’habitent. Esquissant un portrait choral de Franciliens saisis dans leur quotidien, la réalisatrice tisse ainsi librement le récit d’un “nous” possible. Comment faire communauté au-delà des différences ? Comment agréger des micromondes, à la lisière les uns des autres, sur un même territoire ? En questionnant en toute sensibilité les dissemblances mais aussi l’humanité partagée de ce “nous” flou voué à l’impermanence, Alice Diop documente d’abord les vies “ordinaires” des oubliés de la photo et leur restitue une place dans le cadre national.


Gagarine 
Fiction
23 juin 2021 (France)
Réalisateurs : Fanny Liatard, Jérémy Trouilh


Youri est un adolescent de 16 ans, qui vit à Gagarine, l’immense cité de briques rouges d’Ivry-sur-Seine. Depuis qu’il est tout petit, il rêve de devenir cosmonaute. Un jour, il apprend que la cité de son enfance est menacée de démolition, Youri décide de rentrer en résistance.

Dans le domaine musical, la banlieue est une source d’inspiration pour des artistes venus d’horizons musicaux très différents. De la variété française au hip-hop, tous se sont emparés de ce territoire pour en dépeindre le paysage et en raconter les conditions de vie.

  • En 1937, l’artiste Réda Caire chante Ma banlieue, qu’elle présente comme un lieu de villégiature pour s’évader de la capitale :

Quand on vit dans la capitale
On a besoin de changer d’air
Et vers la campagne on détale
Par la douceur d’un matin clair
On voudrait bien aller à Nice
Hélas on n’a pas les moyens
Mais la banlieue a ses délices
C’est moins chic mais c’est aussi bien.

  • En 1977, Jacques Brel compose et interprète Orly, une chanson racontant la séparation d’un couple à l’aéroport : 

Ils sont plus de deux mille et je ne vois qu’eux deux
Je crois qu’ils sont en train de ne rien se promettre.

  • En 1982, Renaud interprète Banlieue Rouge, texte qui évoque les avantages et inconvénients de la vie quotidienne en banlieue :

Elle crèche cité Lénine
Une banlieue ordinaire
Deux pièces et la cuisine
Canapé frigidaire
Préférerait habiter
Cité Mireille Mathieu

  • En 1983, Karim Kacel chante Banlieue, un titre qui s’inquiète du sort de la jeunesse banlieusarde :

Hé banlieue, empêche-les de vieillir
 Leur jeunesse se tire, banlieue
Hé banlieue, ta grisaille ne m’inspire
Que l’envie de partir, banlieue
Hé banlieue, ne les laisse pas tomber
Ils ont droit d’exister eux aussi
Banlieue… oh oh… banlieue.

  • Dans les années 90, les rappeurs de la Mafia K’1 Fry (Kery James, 113, Rohff) s’imposent dans le Val-de-Marne. De son côté, Booba se proclame duc de Boulogne et NTM (Joeystarr et Kool Shen) deviennent des artistes phares de la Seine-Saint-Denis. Tous revendiquent un sentiment d’appartenance aux territoires de la banlieue et entendent raconter la réalité vécue par leurs pairs : racisme, discriminations, pauvretés, etc.
  • En 2007, c’est Charles Aznavour qui, dans son titre Moi je vis en banlieue, raconte la vie de la population immigrée : 

Moi je vis en banlieue depuis ma prime enfance
J’ai fréquenté la rue et fait le coup de poing
Avant que, pour mon cœur, un jour tourne la chance
Et que l’amour m’accroche au détour du chemin.

  • En 2019, Alain Souchon interprète Ici et là. Il y présente le périphérique qui sépare la banlieue et Paris comme une frontière difficile à franchir :

Le regard que nous portons sur ce hasard
Ces 40 mètres de goudron qui nous séparent
Tu sautes le périph’, hop allez
I shot the sheriff
Ici et là, ici et là